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Renforcer la protection des enfants en danger. Coûte que coûte.

5 novembre 2013 Thierry 0 Comments

La Tribune de Genève s’est récemment faite l’écho de l’augmentation de la maltraitance chez les enfants en Suisse. 1138 cas ont été recensés par les diverses institutions pédiatriques en 2012. Ce sont évidemment 1138 cas de trop. En l’espace de deux ans, ce chiffre a augmenté de près de 25%.

La situation est donc préoccupante. Elle est à mon sens le reflet d’une société en faillite qui ne sait ou ne peut plus garantir une éducation et des conditions de vies décentes pour ses enfants.

Heureusement, pour ce qui est de Genève, des solutions existent pour assurer un cadre éducatif adéquat à notre jeunesse. Et parmi les nombreux acteurs sociaux impliqués dans le domaine, il convient de souligner ici l’incroyable travail effectué par le Service de protection des mineurs (SPMi). Pour y avoir autrefois travaillé en tant qu’éducateur spécialisé, je connais bien cette institution.

Dans des conditions parfois dantesques, les hommes et les femmes du SPMi s’engagent sans retenue, au quotidien, dans un contexte juridique extrêmement complexe, pour protéger nos enfants et offrir à nos familles un appui éducatif fondamental. Il est toujours plus facile de regarder le verre à moitié vide et de constater que, malgré le travail formidable des travailleurs sociaux, les cas de maltraitance continuent d’exister. Mais est-on seulement conscient du nombre situations parviennent chaque année à trouver une issue positive grâce à l’intervention du SPMi ?

Aujourd’hui, le climat au SPMi est, on le sait, passablement tendu. Le personnel a annoncé une grève illimitée. Les collègues du service de protection de l’adulte les ont rejoint.

Quelles sont les pistes ? ll faut selon moi impérativement organiser des assises de la protection et de l’aide à l’enfance. Il s’agirait de rassembler et mobiliser l’ensemble des acteurs du secteur (SPMi, FASe, Office de la jeunesse, etc.) pour mobiliser les ressources existantes. Il faudra en outre affirmer dans la nouvelle loi actuellement en consultation sur la promotion de la santé, la prévention et la protection des enfants, le rôle complémentaire des communes, qui sont dans ce domaine d’excellents relais de proximité. Il s’agit également de donner enfin aux travailleurs sociaux en charge des questions éducatives les moyens nécessaires pour mener à bien leurs missions. Cela passe par un refus catégorique de voir l’Etat diminuer ses prestations sociales à destination des familles.

Il devient aussi urgent d’ouvrir aujourd’hui de nouvelles structures d’accueil, car la pénurie se fait vraiment ressentir. Il devient, en l’absence de places disponibles, difficile voir impossible de protéger des mineurs. Il s’agira enfin de créer de nouveaux foyers pour les enfants et adolescents atteints de troubles du comportement. Une mesure nécessaire dont on parle à Genève depuis 20 ans, mais que personne n’a encore suffisamment voulu imposer dans le débat public.

Il est faux de prétendre que la revendication principale des travailleurs sociaux est salariale. Les assistantes et assistants sociaux du SPMI réclament du temps de suivre, de rencontrer, d’encourager, de cadrer, d’analyser, de consulter, de discuter, de convaincre les mineurs et leurs parents. Pour cela, le nombre de dossiers est capital et pour obtenir du travail de qualité. Je ne me prononce pas sur le nombre de dossiers par travailleurs sociaux, je n’ai pas tous les éléments en mains pour le faire, mais ce que je sais c’est qu’il est nécessaire de faire descendre le nombre de dossiers par travailleurs sociaux. Tout le monde conviendra que c’est à ce prix qu’un travail de qualité peut se dérouler au bénéfice des mineurs.

Aujourd’hui, le SPMi est en grève. Je ne peux pas m’empêcher de partager une partie des revendications légitimes de ce service. Au-delà de la simple question financière, c’est toute la question de la reconnaissance que la société doit à une profession terriblement exposée. Les travailleurs sociaux du SPMi ont des responsabilités énormes et chaque erreur, minime soit-elle, peut avoir des conséquences dramatiques. Travailler au SPMi – je le sais par expérience – c’est être soumis quotidiennement à une immense pression : la pression du cadre juridique stricte, mais aussi la pression qui nécessite de traiter des situations souvent complexes en un minimum de temps, et avec efficacité. Or, aujourd’hui, les conditions de travail sont devenues telles, que cette efficacité du travail social est devenue de plus en plus difficile au SPMi.

Il est temps que notre société change sa vision des travailleurs sociaux en général, et des collaborateurs du SPMi en particulier, lesquels accomplissent un travail prodigieux dans des conditions dantesques. Et un travail nécessaire. Au-delà de la revalorisation professionnelle de leur activité, c’est la revalorisation sociale de leur mission sur laquelle qu’il convient aujourd’hui de travailler et je veux m’y employer.

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