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Faire de la précarité un vrai thème politique

Les Suisses viennent soudain de se rendre compte de l’extrême pauvreté, souvent invisible, qui règne dans notre pays. Invisible la plupart du temps, mais réelle au quotidien pour une frange croissante de la population. Les images, que chacune et chacun a vues, de ces longues files d’attente pour une aide plus humanitaire qu’alimentaire sont une honte pour le pays le plus riche du monde.

Seul avantage de cette situation dramatique: on ne pourra plus cacher sous le tapis les conditions iniques d’existence de celles et ceux qui se retrouvent au bord du chemin et ne bénéficient pas des fruits d’une prospérité à laquelle ils et elles participent pourtant pleinement.

Cynisme ou aveuglement?

Rien de nouveau me direz-vous. Juste une visibilité un peu plus grande d’une situation malheureusement sans surprise pour les professionnels de l’action sociale qui ne cessent de tirer la sonnette d’alarme depuis des années. Nous aimons volontiers bomber le torse et vanter urbi et orbi l’opulence de notre pays. Nous sommes en revanche bien moins fiers des mécanismes d’exclusion et des situations de précarité qui accompagnent notre insolente réussite. C’est un fait: les inégalités se creusent!

Et là, il convient peut-être de tourner notre regard vers la Confédération et rappeler la responsabilité qui est aujourd’hui la sienne sur le volet de la lutte contre la précarité et l’exclusion

On regarde parfois avec une certaine condescendance certains de nos voisins européens et leur système social défaillant ou incomplet. Il est temps cependant de nous réveiller, même si c’est avec la gueule de bois. Il serait pourtant faux d’affirmer que la Suisse ne lutte pas contre la précarité. Cantons et communes sont extrêmement actifs sur ce front et, c’est vrai, redistribuent des milliards pour corriger les inégalités. Nous pouvons en être fiers. Mais force est de constater que ça n’est pas suffisant et que les mailles de notre filet social sont encore bien trop larges. Et là, il convient peut-être de tourner notre regard vers la Confédération et rappeler la responsabilité qui est aujourd’hui la sienne sur le volet de la lutte contre la précarité et l’exclusion. Elle avait pourtant mis du sien, il y a de cela quelques années, en lançant un ambitieux programme national de lutte contre la pauvreté (2014-2018). Aujourd’hui, elle finance des mesures avec un budget de… 250 000 francs par an! Cynisme ou aveuglement? On est en droit de se poser la question quand l’Office fédéral de la statistique estime à 8,2% la proportion des Suisses touchés par la pauvreté.

Un certain brio

Il est donc indispensable aujourd’hui que la Confédération joue son rôle de garante de la cohésion sociale dans notre pays. Il semble que, au niveau de l’Assemblée fédérale, les choses commencent à bouger et que des objets parlementaires déposés incitent le Conseil fédéral à se positionner. Mais il serait plus efficace et judicieux que celui-ci se saisisse par lui-même de cette problématique.

La Suisse a su gérer avec un certain brio l’urgence sanitaire. Elle a su également faire face à l’urgence économique, en injectant des dizaines de milliards pour sauver nos entreprises. Il est temps aujourd’hui qu’elle investisse la même énergie dans la réparation sociale de cette crise sanitaire sans précédent. C’est le défi posé au Conseil fédéral pour les mois à venir. Et Genève sera à ses côtés.

 

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