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[BLOG] Déboutés de l’asile: dénoncer la tartufferie et les compétences gâchées

Rarement les entreprises ont cherché autant de personnel qu’aujourd’hui. L’Office fédéral de la statistique indique que le taux de vacance des emplois a bondi de 60%. Actuellement, 100 000 équivalents plein-temps sont disponibles et les prévisions d’emplois sont à la hausse: +3,9%. Après la crise pandémique qui a mis à mal de nombreux secteurs, ces bonnes nouvelles illustrent la capacité de résilience de l’économie.

En même temps, le Conseil fédéral rejette les conclusions de la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national, qui souhaite faciliter l’accès à la formation professionnelle et à l’emploi pour les requérants d’asile déboutés. Ce rejet du Conseil fédéral paraît déconnecté des réalités que la commission, majoritairement à droite, a bien perçues en adoptant une position hors des clivages politiques traditionnels.

Sur le papier, les requérants d’asile déboutés ont accès depuis 2013 à la formation professionnelle. Concrètement toutefois, le cadre est si restrictif que, en neuf ans, et dans les 26 cantons, seules 61 personnes ont pu bénéficier de cette opportunité. Soit 0,2 personne par canton et par année, en moyenne.

Contradiction

La réalité est que nombre de jeunes dont la demande d’asile a été rejetée souhaiteraient travailler ou suivre une formation. Beaucoup sont très bien intégrés, maîtrisent la langue et résident de longue date en Suisse. Ils sont néanmoins placés dans l’impossibilité d’exercer un emploi ou même d’achever une formation en cours car leur autorisation de travailler s’éteint, après une décision négative du Secrétariat d’Etat aux migrations, alors même que leur renvoi n’est pas immédiatement effectif, voire est impossible.

Sans aucune perspective d’avenir, ils et elles dépendent de l’aide d’urgence cantonale. Humainement pénible, cette situation n’est dans l’intérêt ni de la société, ni de l’Etat, ni de l’économie. Cette politique doit être réformée. C’est aussi l’avis du groupe d’accompagnement qui s’exprime dans le rapport du Conseil fédéral «Pour un examen global de la problématique des sans-papiers» (2020), groupe au sein duquel étaient notamment représentées la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales (CDAS), la Conférence suisse des chefs des départements cantonaux de l’économie publique (CDEP) et l’Union suisse des arts et métiers (USAM).

Un assouplissement ne créerait pas une marée. Mon canton, Genève, compte une soixantaine de personnes concernées; des jeunes tout à fait motivés, aptes à exercer un emploi ou à parfaire leur formation, dotés de talents qui ne demandent qu’à être employés.

Cependant, le rejet par le Conseil fédéral, fin mai, de la motion 22.3392 sur l’assouplissement de la réglementation relative aux autorisations de séjour pour cas de rigueur dans le domaine de l’action professionnelle ne va pas dans ce sens.

L’aide sociale, onéreuse et immobiliste

Le coût de l’aide sociale est élevé et ne constitue pas un investissement à court terme. En revanche, la valorisation de la formation et l’exportation en cas de départ des compétences acquises en Suisse constituent, dans un premier temps, un soutien direct à l’économie et en second lieu, une aide au développement.

Refuser l’immobilisme, c’est aider les entreprises, former des jeunes et dénoncer une tartufferie. Au pays natal du droit et de l’action humanitaires, il est permis de poser de telles questions. Elles portent sur le fond, sur la forme, sur l’éthique et sur le droit.

Les Chambres s’exprimeront en dernier lieu. Il est à souhaiter qu’elles suivent l’avis de la CIP.

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