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La «loi Netflix» est vitale pour le cinéma romand

31 août 2021 Thierry 0 Comments

Le cinéma a connu trois révolutions majeures depuis son invention en 1895. Le son, la couleur et plus récemment le changement de format. Aujourd’hui, un film se voit en salle ou à la maison, en streaming. Les plateformes de diffusion comme Netflix rivalisent en puissance avec les studios qui ont fait la gloire d’Hollywood mais dont la suprématie est dépassée. Ces plateformes diffusent des films et elles participent aussi aux productions. Autrefois réticentes, les plus grandes figures tournent avec Netflix ou HBO. Certes, les films doivent être vus en salle. Mais les séries? En France, Marseille (avec Depardieu), Lupin (avec Omar Sy) ou Dix pour cent (tout l’annuaire du cinéma) doivent beaucoup à Netflix. Le modèle économique et le format changent avec les usages. Cela nous concerne directement et c’est au menu du parlement national cet automne.

Dynamiser les investissements directs

Dans son programme pour la culture 2021-2024, le Conseil fédéral prévoit d’instaurer un prélèvement de 4% sur les recettes en Suisse de diffuseurs en ligne, à moins qu’ils ne soutiennent par eux-mêmes (et dans les mêmes proportions) des productions indépendantes suisses. Le Conseil des Etats l’a accepté. Or, au sein du Conseil national, des voix s’élèvent pour contester le taux de 4% au profit d’une variante à 1%. Cela n’a pas de sens. L’objectif de la «loi Netflix» (en réalité modification de la loi sur le cinéma) consiste à dynamiser les investissements directs dans la branche audiovisuelle suisse indépendante, à augmenter le nombre de productions suisses et à diversifier le type de productions que soutiendraient de grands groupes internationaux qui pourraient, de surcroît, les diffuser mondialement.

Le taux de 4% proposé par le Conseil fédéral s’adosse à la moyenne basse

Ce mécanisme existe ailleurs. Le taux de 4% proposé par le Conseil fédéral s’adosse à la moyenne basse. La France oscille entre 20% et 25%, plus une obligation d’investissement de 5,15%. La taxe italienne est à 10%. L’Allemagne applique une taxe de 2,5% pour l’encouragement du cinéma mais sans retour sur investissement. Les chaînes suisses de télévision sont déjà soumises à une taxe similaire de 4%. Ce qui changera avec la modification de la loi sur le cinéma, c’est le champ, puisque les plateformes étrangères de streaming y seront soumises aussi. L’argument selon lequel elles augmenteraient en conséquence le prix des abonnements n’est pas pertinent. La base de calcul, dans les pays observés, c’est le pouvoir d’achat moyen et non le niveau de la taxe.

Le seuil de 4%

Un seuil de 4% peut permettre à des plateformes comme Netflix de financer largement, voire intégralement, de nouvelles séries suisses et notamment romandes. Un taux à 1% ne suffit pas à motiver de nouvelles créations. La Suisse romande restant un bassin modeste en regard de la Suisse alémanique, c’est à Zurich que Netflix coproduit actuellement sa première série helvétique, Early Birds. Parmi ses partenaires, elle compte CH Media (13 télévisions, entre autres), groupe qui, d’ailleurs, prépare pour la fin de l’année le lancement de sa propre plateforme.

En Suisse romande, rien de tel. La contribution des cantons au cinéma tous formats passe par la fondation Cinéforom, que Genève finance pour moitié. En 2019, cette fondation a mandaté le cabinet Ernst & Young pour mieux cerner la dimension économique de la production audiovisuelle. Il est apparu que l’investissement financier de 39 millions consenti entre 2013 et 2017 a généré 122 millions de francs dans l’économie (technique, services, hôtellerie, transports…), sans compter les emplois. Une opportunité s’ouvre de dynamiser localement cette industrie en incitant les GAFA à y investir. Réduire le projet de «taxe Netflix» de 4% à 1%, c’est couper net et sans contrepartie une pente ascendante.

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