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Discours à l’ACG du 26 septembre: « Communes et Canton doivent se faire confiance! »

26 septembre 2020 Thierry 0 Comments

Madame la Présidente de l’Union des communes vaudoises, Monsieur le Président de l’Association des communes genevoises, Mesdames et Messieurs les membres des Exécutifs communaux,
Madame et Messieurs les anciens présidents, Monsieur le Directeur général de l’Association des communes genevoises, Mesdames et Messieurs, Chères et chers amis,

La présidente de l’Union des communes vaudoises ne m’en voudra pas pour ce début chauviniste: je crois en Genève. Je crois en sa force créative. Je crois en sa capacité de dialogue.. Je crois en son histoire. Je crois en son avenir.

Et je crois en ses autorités. Je crois en vous, Mesdames et Messieurs.

Il y a bien sûr des différences entre les échelons municipal et cantonal.

J’ai eu la chance, vous le savez, de participer à l’exécutif de Vernier durant 15 ans, la deuxième ville du canton. Et celle où le revenu brut par habitant est le plus faible.

Je sais combien le rôle des autorités de proximité compte pour nos administré.e.s.
J’ai eu aussi le privilège d’assurer la présidence de votre association des communes. Même si la fonction que j’occupe aujourd’hui exige une autre focale, je sais les préoccupations qui sont les vôtres, je les fais miennes… elles sont toujours miennes !

Oui, Mesdames et Messieurs, je crois en vous. Je crois en nous.

C’est pourquoi je ne peux plus me satisfaire de cette culture querelleuse qui, trop souvent, préside aux relations entre les communes et le canton, entre autorités municipales et cantonales.

On pourrait même dire qu’elle est inscrite dans les gênes de l’Association des communes genevoises. L’article 5 de vos statuts indique que son but est de « défendre les intérêts communs de ses membres face aux autres pouvoirs publics ». Les mots ont un poids.

Au lieu d’un « côte à côte », cette formulation programme le « face à face » implacable. Les « Je t’aime moi non plus ».

N’en avez-vous pas assez de lire une presse qui titre « les communes déclarent la guerre au canton », ou « la ville et le canton à couteaux tirés ».

Le vocabulaire martial plaît aux journalistes. Il séduit parfois même jusqu’aux élus. Moi, il me chagrine.

La population, vous le savez comme moi, peine souvent à distinguer les divers échelons du fédéralisme qui compose notre système politique.
Lorsque les autorités communales et cantonales affichent leurs différends au grand jour, c’est l’ensemble de la classe politique qui s’en retrouve délégitimée. Lorsqu’on ajoute à ces désaccords un vocabulaire belliqueux, menaçant ou condescendant, nous ne jetons pas l’opprobre sur nos adversaires: nous nous salissons nous-mêmes.

N’oublions pas que les citoyen.ne.s, ont en elles et en eux un attachement fort pour leur commune ET pour leur canton. Les tensions qui peuvent surgir entre nous sont avant tout des pics que nous lançons dans le cœur de chaque citoyen.ne… comme si chaque habitant.e. devait donner raison à un échelon ou l’autre, lui donner raison.

L’exagération fait partie de la rhétorique politique. Mais attention, Mesdames, Messieurs, le vocabulaire finit toujours par déteindre sur la réalité, par lui imprimer sa propre vérité.

Alors, attention au vocabulaire. J’ai pu entendre, à propos du projet de loi visant à faire participer les communes les plus aisées au financement de la politique sociale, des élans rhétoriques aux accents franchement hostiles, au-delà de toute mesure. Prenons garde. Nos administrés nous écoutent encore. Ils sont bien sûr de moins en moins nombreux à le faire, de plus en plus à s’abstenir. L’indifférence gagne du terrain. Mais celles et ceux qui continuent de lire, de débattre, de voter, combien de temps croiront-ils encore en nous ?

La population élit des autorités pour qu’elles trouvent des solutions, pas pour qu’elles amusent la chronique.
Des solutions qui impliquent un dialogue constant entre autorités de proximité et canton. Ces solutions, les Genevoises et les Genevois en ont besoin. Et ils les méritent.

Les Genevoises et les Genevois veulent un urbanisme de qualité. Des éléments de grand paysage préservés. Une agriculture de proximité. Mais ils ont aussi besoin de se loger. Il faut donc continuer de construire, mais en respectant au mieux le territoire, son histoire, ses usages. C’est le sens du dialogue canton-communes en matière d’urbanisme. Un préavis bien étayé fait avancer les intérêts de la commune bien mieux que des rebuffades.

Les Genevoises et les Genevois veulent aussi combattre l’urgence climatique. Ils espèrent pour cela que nous conduisions des politiques à l’échelon international, national, cantonal et communal. Que nous construisions des réseaux de chauffage à distance, que nous développions le solaire thermique, que nous réduisions la consommation d’énergies fossiles. Mais aussi, au niveau local, que nous soutenions les ménages privés pour consommer moins, jeter moins, recycler mieux.

Les Genevoises et les Genevois veulent aussi des prestations culturelles. Ils veulent des écoles de musique et des concerts, des festivals, des pièces de théâtre, des musées. Ils veulent une valorisation de notre patrimoine immatériel. Ils veulent de la danse, de l’art contemporain.

Et ils ne se soucient pas de savoir si le spectacle auquel ils assistent est subventionné par le canton ou par une commune.
Ils nous ont chargés, en votant l’initiative 167, de nous mettre d’accord. Non pas pour que chacun fasse exactement ce que fait l’autre aussi. Mais pour que nous nous coordonnions. Une politique culturelle cohérente, voilà ce qu’ils demandent.

Les Genevoises et les Genevois veulent pratiquer du sport. Ils ont besoin des infrastructures que les communes mettent à leur disposition. Ils ont besoin de la piscine des Vernets, de celle du Lignon, de celle de Carouge, de celle de Marignac, et de toutes les piscines liées à des écoles primaires.

Ils ont besoin de celle que 10 communes vont construire à Pré-Bois, sur un terrain que le canton leur met à disposition. Ils ont besoin de celle que la Ville de Genève veut construire aux Eaux-Vives. Ils ont besoin de celle que Cologny et d’autres communes de la Rive Gauche espèrent construire à Genève-Plage, qui appartient pour l’instant au canton.

Ils ont besoin du Stade de Genève, mais surtout ils ont besoin que nous trouvions un site pour héberger le pôle football, pour que les milliers de juniors prometteurs puissent s’entraîner après le refus du projet du Pré-du-Stand. Ils ont besoin de la patinoire du Trèfle Blanc, que le canton envisage de construire et dont vous savez combien il me tient à cœur.

Les Genevoises et les Genevois veulent bénéficier de soins de qualité, lorsque leur santé est atteinte. Les Genevoises et les Genevois veulent que, comme partout ailleurs en Suisse, on développe des réseaux de proximité pour aider les personnes âgées dans les tâches de la vie quotidienne. Qu’on évite de les livrer à l’isolement. Qu’on leur apporte un soutien administratif, quand la moindre facture de téléphonie mobile est aujourd’hui écrite dans un sabir bourré d’anglicismes. Et, le plus souvent, envoyée par e-mail à une adresse déjà saturée de spams, de publicités et d’arnaques. Sur ce volet particulier, vous savez combien je considère que le rôle des communes est important. Essentiel, la loi vous a confié cette auguste tâche. Nous pourrons en reparler très prochainement.

Et puis, les Genevoises et les Genevois veulent manger. Pour certaines et certains d’entre eux, comme on l’a vu ce printemps jusqu’à la Une du New York Times, manger est, même à Genève, un combat quotidien. Ils ont besoin de nous pour cela. D’une coordination efficace, d’une volonté commune de collaborer en bonne intelligence, avec fluidité et pragmatisme. Ils ont aussi besoin de dormir à l’abri du froid, à l’abri des violences de la nuit, à l’abri de la misère. Quel que soit leur état de santé, ils ont besoin de cela.

Les Genevoises et les Genevois ont, enfin, besoin d’un emploi. Un tiers de la population de notre canton est aujourd’hui au chômage. Soit entièrement, soit au chômage partiel.

50 % de la population active de ce canton a bénéficié de RHT. Pour une entreprise, le chômage partiel ne résout pas tout. Il lui permet d’éviter de licencier un personnel dont elle pense avoir besoin quand l’activité reprendra. Mais pendant ce temps, l’employeur continue d’assumer les charges sociales.

Le chômage partiel n’est donc pas gratuit pour l’entreprise. Un licenciement coûterait à l’employeur environ 3 mois de salaire plein.

En 8 à 9 mois, le chômage partiel coûte autant. En décembre, nous aurons atteint ce délai. Les entreprises sont toutes en train de faire leurs comptes. Nous devons nous attendre, si l’activité économique continue de stagner, à beaucoup de licenciements. A de la détresse. Et nous devrons en assumer collectivement les sinistres conséquences.

Sur la plupart de ces dossiers, vous le savez, nous cherchons depuis des années des solutions pour travailler main dans la main, communes et canton. Je ne suis pas partisan de la précipitation. Mais nous n’avons pas le droit non plus de nous satisfaire des postures de blocage.

J’ai foi en Genève, comme je vous le disais, et j’ai foi en vous. Vous allez prendre congé de nombreuses personnalités qui ont œuvré, ces dernières législatures, pour le bien de leur commune. J’ai eu l’occasion il y a quelques jours de leur témoigner ma gratitude et celle du Conseil d’Etat. Elles ont d’ailleurs démontré ce printemps que, quand l’urgence frappe à la porte, les solutions trouvent un chemin. Dès le 17 mars dernier, en 24 heures pour certaines d’entre elles, elles ont mis sur pied des plans de solidarité communale pour prêter secours aux seniors confinés chez eux. Démontrant au passage que c’est bien l’échelon communal qui est le mieux adapté pour répondre à ce besoin.

Oui, quand l’urgence frappe à la porte, les solutions trouvent un chemin. Et nul autre que les communes n’ont cette capacité d’agir, cette rapidité d’exécution, cette connaissance de leur population, de leurs quartiers, de leur terrain.

Or, Mesdames et Messieurs, l’urgence frappe, et c’est maintenant.
Pendant quelques mois, le doux soleil d’été, les terrasses des cafés, les quais emplis de baigneurs, ont pu nous faire oublier que, partout autour de nous, le monde traverse une crise sans précédent. Mais regardez bien. Nos hôtels sont vides. Aucun congrès n’est plus planifié, aucune rencontre internationale. Les marchés d’exportation de notre industrie sont eux aussi paralysés ou emplis d’incertitudes.

Oui, Mesdames et Messieurs, l’urgence n’en est plus une: elle s’est durablement installée dans notre quotidien.

Quelle sera notre réponse collective ? Au moment où un tiers de la population tremble pour ses emplois, cette toute-puissance induit une responsabilité. Nous serons jugés en fonction de nos résultats collectifs, pas en fonction de notre puissance rhétorique.

Oui, Mesdames et Messieurs, notre responsabilité est immense.

Cela tombe bien, car je crois en vous.

Je crois, pour toutes celles et ceux qui ont déjà effectué une ou plusieurs législatures, à leur capacité de voir que le monde d’hier n’est plus. Je crois, pour toutes celles et ceux qui ont prêté serment cette année pour la première fois, à leur volonté d’empoigner ces problèmes, pour les résoudre.

Mesdames et Messieurs, chers amis, vous avez élu un nouveau comité avec lequel je me réjouis de travailler.

Cette Assemblée générale étant presque terminée, j’aimerai encore vous dire un mot : vous inviter, vous aussi, à avoir confiance en vous, confiance en nous, confiance en Genève. Les habitantes et les habitants de ce canton attendent que nous nous montrions innovants.

J’affirme aussi qu’ils le méritent.

Je vous donne rendez-vous pour chacun de ces chantiers et bien d’autres.

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